Hyperthyroïdisme

Trouvez-vous que votre vieux chat a pris un « coup de jeunesse »? Est-il plus alerte qu’avant? Semble-t-il avoir maigri malgré qu’il mange autant sinon plus qu’avant? Recherche-t-il les endroits plutôt frais? Urine-t-il et boit-il plus qu’avant? Vomit-il? A-t-il de la diarrhée? Ces symptômes sont typiques d’une maladie appelée hyperthyroïdisme. Cette condition survient lorsque la glande thyroïde produit trop d’hormones thyroïdiennes. Par conséquent, le métabolisme de l’animal se trouve accéléré ce qui cause l’apparition des symptômes mentionnés. À l’opposé, on retrouve parfois des cas atypiques où l’on observe alors un chat plus amorphe et qui mange moins.

La condition

Cette condition a des répercussions sur tout l’organisme. Les problèmes concomitants les plus fréquents se produisent au niveau du cœur, de la pression artérielle, du tractus gastro-intestinal ainsi que des reins. Le changement le plus fréquent au niveau du cœur est que sa paroi va finir par s’épaissir et deviendra plus rigide parce que le travail du cœur est augmenté de façon chronique lors d’hyperthyroïdisme. Il va alors avoir de la difficulté à se distendre pendant sa phase de relaxation donc une moins grande quantité de sang pourra y entrer et par conséquent, moins de sang en sortira. On détectera alors, lors de l’examen physique, une augmentation de la fréquence cardiaque accompagnée parfois d’un souffle cardiaque (dû à la turbulence du sang), un déficit de pouls ou une atténuation des bruits cardiaques s’il y a accumulation de liquide autour des poumons (dû à l’augmentation de la pression hydrostatique dans les vaisseaux sanguins des poumons). Dans des cas plus rares, le cœur deviendra plutôt dilaté avec une réduction de sa capacité de contraction. Les anomalies cardiaques notées à l’examen physique seront les mêmes dans les deux cas et les deux peuvent résulter en une défaillance cardiaque. Tandis que l’épaississement de la paroi du cœur est réversible avec le traitement de l’hyperthyroïdisme, ce n’est pas le cas lorsque le cœur est dilaté.

De l’hypertension est fréquente lors d’hyperthyroïdisme, mais plutôt rarement associée à des symptômes apparents. Ceux-ci se limitent généralement à des anomalies au niveau de la rétine pouvant entraîner de la cécité.

Les symptômes

Les symptômes de dérangements gastro-intestinaux mentionnés plus haut sont surtout dus au fait qu’il y a une augmentation de la motilité intestinale ainsi que de la malabsorption. Au niveau du foie, il peut y avoir apparition de dommages suite à l’hypoxie (baisse du niveau d’oxygène dans le sang) engendrée par l’hyperthyroïdisme. Lorsque la condition est traitée, ces dommages disparaissent généralement parce que le foie a un grand pouvoir de régénération.

Il est très fréquent qu’un vieux chat souffre d’insuffisance rénale en même temps que d’hyperthyroïdisme. Dans cette situation, l’insuffisance rénale se retrouve souvent masquée par l’hyperthyroïdisme qui, en fait, améliore la perfusion des reins donc cela aide à éliminer les déchets métaboliques produits par les différents organes. Lorsque la condition est traitée, il est commun de voir apparaître de l’insuffisance rénale chez un chat qui n’en semblait pas atteint au préalable.

Diagnostique

Mise à part l’historique des symptômes rapportés par le propriétaire, la palpation des glandes thyroïdes anormalement grosses ainsi que les anomalies cardiovasculaires détectées lors de l’examen physique feront en sorte que le vétérinaire soupçonnera la condition. Pour la confirmer cependant, il lui faudra effectuer un test qui mesurera le niveau d’hormones thyroïdiennes dans le sang. Une analyse sanguine plus complète permettra possiblement de déterminer s’il y a de l’insuffisance rénale et/ou des dommages hépatiques. S’il y a présence d’anomalies à l’auscultation cardiaque alors, il sera recommandé d’investiguer ces problèmes en prenant des radiographies thoraciques et en faisant une échographie cardiaque. Ces moyens sont utiles afin de déterminer l’ampleur du problème cardiaque, de choisir quelle médication utiliser dans le but de ralentir le plus possible la progression de la maladie cardiaque et d’évaluer s’il y a présence de liquide autour des poumons.

 

Traitement

Le traitement de l’hyperthyroïdisme consiste à diminuer la quantité d’hormones thyroïdiennes jusqu’à un niveau situé à l’intérieur d’un écart de valeurs normales. Il existe 3 modalités thérapeutiques différentes qui accomplissent cet objectif dont 2 sont curatives.

La première option consiste à administrer du méthimazole par voie orale. Ce médicament agit en inhibant la synthèse des hormones thyroïdiennes et est généralement donné 2 fois par jour à vie. Il permet un contrôle de la condition, mais n’est pas curatif. Les effets secondaires associés sont généralement peu sévères, temporaires et apparaissent surtout lors des 2 premiers mois de traitement. Ils consistent principalement en de l’abattement, de la perte d’appétit et des vomissements. Pour moins de 10% des chats, des changements légers au niveau de la formule sanguine peuvent survenir. Encore moins fréquemment, mais plus inquiétant, il peut y avoir une réduction importante dans le nombre de plaquettes sanguines (cellules impliquées dans la coagulation) et de neutrophiles (cellules impliquées dans la défense contre les infections) ainsi que le développement d’anémie causée par la destruction des globules rouges par le système immunitaire. Chez moins de 2% des chats, le médicament peut être toxique pour le foie et entraîner l’apparition de symptômes identiques à ceux décrits plus hauts accompagnés en plus de jaunisse et d’anomalies au niveau des enzymes hépatiques. 


Le principal inconvénient associé à l’utilisation de ce médicament est que le contrôle de la condition est parfois plutôt erratique à cause de la variation journalière du niveau des hormones thyroïdiennes dans le sang. De plus, certains chats sont difficiles à médicamenter oralement ce qui peut encore là résulter en un mauvais contrôle et une apparente résistance au traitement. Certaines pharmacies vétérinaires spécialisées offrent le médicament sous forme d’un gel à appliquer sur le pavillon des oreilles ou encore dissout à l’intérieur d’une gâterie que le chat ingère volontairement (différentes saveurs sont disponibles). Les effets secondaires sont les mêmes qu’avec les comprimés et leur coût est plus élevé. 

En début de traitement, la dose utilisée sera relativement basse. Au bout de quelques semaines (généralement entre 2 et 4 semaines), il sera recommandé d’effectuer un examen physique ainsi que des analyses sanguines afin de vérifier l’état général du chat, s’il y a des changements au niveau de la formule sanguine et si le niveau d’hormones thyroïdiennes est redevenu normal. Selon le résultat, on décidera si un changement de dose du médicament est nécessaire. Suite à tout changement de dose, les mêmes paramètres devront être évalués de nouveau au bout de quelques semaines de traitement. Lorsque la condition semble bien contrôlée, que le niveau d’hormones est normal et qu’il n’y pas d’effet secondaire important associé au traitement, une réévaluation est requise généralement à chaque 6 mois ou 1 an selon le cas.

La deuxième option thérapeutique consiste à exciser chirurgicalement les portions de la glande thyroïde qui ont augmenté de volume. Ce traitement est généralement curatif, mais il est toujours possible qu’il y ait récurrence de l’hyperthyroïdisme 6 à 24 mois plus tard si toutes les cellules anormales ne sont pas enlevées. C’est pourquoi il est recommandé de faire mesurer le niveau d’hormones thyroïdiennes une ou deux fois par année après le traitement. Le chat affecté n’est pas un bon candidat à la chirurgie si son risque anesthésique est considéré trop élevé, si sa fonction rénale est douteuse, si le risque de développement d’hypocalcémie (baisse du niveau de calcium dans le sang) postopératoire est élevé, s’il y a du tissu thyroïdien ailleurs que dans la glande thyroïde ou si l’on soupçonne une tumeur thyroïdienne cancéreuse avec métastases. 

Les 2 complications les plus fréquentes suite à la chirurgie sont le développement d’hypothyroïdisme et d’hypocalcémie. Dans le premier cas, une baisse du niveau d’hormones thyroïdiennes peut apparaître lorsque les 2 lobes de la glande thyroïde ont été enlevés et peut parfois nécessiter un supplément d’hormones à plus ou moins long terme si le chat démontre des symptômes tels que de l’abattement, une perte d’appétit et la recherche d’endroits chauds.

Le développement d’hypocalcémie est une complication plus grave que l’hypothyroïdisme. Cela se produit lorsque les glandes parathyroïdes (situées tout juste à côté de la glande thyroïde) sont excisées ou endommagées par inadvertance lors de la chirurgie de la glande thyroïde. Ces glandes sont responsables du métabolisme du calcium sanguin.

Même si la glande parathyroïde n’a pas été touchée pendant la chirurgie, il peut y avoir apparition d’hypocalcémie pendant plusieurs jours et même plusieurs semaines et ce, probablement parce qu’il y a eu interruption dans la vascularisation des glandes parathyroïdes après la manipulation chirurgicale. Il sera donc important d’évaluer le niveau de calcium sanguin chaque jour pendant environ 1 semaine si les deux lobes de la glande thyroïde ont été enlevés. Les symptômes d’hypocalcémie commencent à apparaître typiquement en moins de 72 heures après la chirurgie et consistent en de l’abattement, de l’anorexie, de la réticence à se déplacer, des fasciculations faciales (surtout au niveau des oreilles), des tremblements et des crampes musculaires, de la tétanie ainsi que des convulsions. Si de tels symptômes apparaissent, il faudra instaurer un traitement pour augmenter le niveau de calcium dans le sang. 

La fonction des glandes parathyroïdes peut parfois revenir après plusieurs jours, semaines ou mois de traitement. Il est difficile de prédire pendant combien de temps le traitement sera nécessaire donc c’est seulement après plusieurs semaines que l’on pourra commencer à essayer de sevrer graduellement le chat tout en surveillant le niveau de calcium sanguin. S’il y a récidive de l’hypocalcémie alors le traitement devra être réinstauré.

La troisième option thérapeutique consiste à injecter au chat par voie sous-cutanée de l’iode radioactif qui se concentrera dans la glande thyroïde et qui détruira sélectivement les cellules qui sont fonctionnelles sans affecter les structures autour de la glande. En général, une seule injection est suffisante pour guérir la condition. Si le chat est assez jeune ou que son niveau d’hormones thyroïdiennes n’est pas excessivement élevé lors de l’injection (il aura alors peut-être été décidé de donner une dose d’iode radioactif plus faible), il se peut qu’il nécessite une deuxième injection quelques années plus tard. 

Le seul effet secondaire relié à ce traitement est qu’il peut y avoir développement d’hypothyroïdisme. Ceci est cependant juste temporaire généralement et est dû au fait que pendant la maladie, les cellules normales de la glande se sont atrophiées (ont diminué de volume) et sont entrées dans un état de dormance. Étant donné que l’iode radioactif a épargné ces cellules, celles-ci vont se remettre à fonctionner éventuellement et ainsi corriger l’hypothyroïdisme causé par la procédure. Jusqu’à ce que la fonction thyroïdienne redevienne normale, le chat devra possiblement être supplémenté en hormones thyroïdiennes s’il démontre des symptômes associés. Les inconvénients reliés à la procédure sont le prix et le fait que l’animal doit être hospitalisé pendant 7 à 10 jours parce qu’il est radioactif pendant cette période. C’est l’option thérapeutique idéale pour les chats dont les 2 lobes de la glande sont très gros, qui ont une masse thyroïdienne ectopique (ailleurs qu’à l’endroit habituel) non accessible ou qui ont une tumeur cancéreuse non opérable ou ayant métastasé.
Peu importe l’option thérapeutique choisie, il est conseillé de commencer par les médicaments oraux initialement afin de renverser les anomalies métaboliques et cardiaques associées à l’hyperthyroïdisme, de diminuer le risque anesthésique associé avec la chirurgie et d’évaluer l’impact du traitement sur la fonction rénale.

Si des effets secondaires trop importants ou que de l’insuffisance rénale apparaissent, alors il est toujours possible d’arrêter ou de diminuer la dose de médicaments oraux contrairement aux deux autres traitements qui sont irréversibles.

Pronostic

Le pronostic pour le chat hyperthyroïdien ainsi que le choix du traitement dépendent de plusieurs facteurs tels que sa condition physique au moment du diagnostic, la présence de maladies concomitantes (surtout de l’insuffisance rénale), la présence d’une tumeur bénigne ou maligne affectant la glande thyroïde ayant métastasé ou non, le nombre de masses thyroïdiennes hyperactives ainsi que la location des masses thyroïdiennes.

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BIBLIOGRAPHIE :
Nelson, RW et Couto, CG. Small animal internal medecine. 3e édition. Mosby. 2003.