Réduction de fracture

Votre animal a développé une boiterie soudaine à un membre? 
Les fractures sont des problèmes que nous voyons fréquemment en médecine vétérinaire. Elles peuvent être primaires, c’est-à-dire causées par un trauma ou encore, secondaires, c’est-à-dire qu’une condition prédisposante (ex : tumeur) a affaiblit l’os et ainsi, précipité la fracture. Les fractures sont des conditions très douloureuses qui se doivent d’être traitées! 

Classification des fractures 


On classe les fractures selon différents critères : 


Apparence du trait de fracture : 

  • Nombre de fragments : fracture simple vs multiple

 
Localisation : 

  • Os affecté : fémur, humérus, tibia, radius, etc. 
  • Portion de l’os : diaphyse, métaphyse, épiphyse 

 

Articulaire vs non-articulaire : les fractures articulaires sont classées selon la classification Salter-Harris de type I à V 


Déplacement : le segment distal (le plus éloigné du corps) est utilisé pour qualifier la direction du déplacement 


Réductibilité : possibilité de réapposer et réaligner l’os de manière anatomique 


Fracture ouverte vs fermée : lors de fracture ouverte, il y a dommages aux tissus mous adjacents.

Diagnostic

Les examens physique et orthopédique permettent d’orienter le diagnostic vers une fracture. En effet, une condition survenue subitement, particulièrement avec une histoire de trauma, peut mettre la puce à l’oreille. À l’examen, une boiterie marquée, une enflure importante, une instabilité, des crépitements et une douleur marquée lors de la palpation peuvent souvent être notés. La radiographie numérique consiste en la méthode de choix pour diagnostiquer cette condition. En effet, les os ont une opacité plus blanchâtre que les tissus mous sur la radiographie; cette méthode est donc efficace pour diagnostiquer les anomalies osseuses. Une discontinuité au niveau de l’os sur les clichés obtenus nous permet de poser un diagnostic de fracture. Étant donné que la radiographie consiste en une image superposée en 2 dimensions, plusieurs vues sont nécessaires pour être en capacité de reconstruire mentalement la fracture en 3 dimensions. Ainsi, un meilleur aperçu du nombre de fragments ainsi que du déplacement de l’os distal peut être obtenu avec un minimum de 2 radiographies. De l’air (noir sur la radiographie) au niveau des tissus mous peu suggérer une fracture ouverte, même lorsqu’aucune plaie n’est visible à l’examen orthopédique. Le CT Scan peut être indiqué lorsqu’un processus tumoral semble être à la base de la fracture. Il permet aussi de détecter de petits fragments que la radiographie peut manquer. Le CT Scan prend toute son indication lors de fracture avec de multiples fragments, bénéficiant ainsi d’une imagerie tridimensionnelle.

Traitement

Le but fixé lors de la réduction d’une fracture est d’apposer et de réaligner les fragments osseux dans la position la plus anatomique possible. Plusieurs méthodes d’immobilisation peuvent être utilisées : 

La réduction fermée (plâtre, fixateur externe) consiste à réduire la fracture sans exploration chirurgicale. Les tissus mous et la vascularisation sont donc préservés et les risques d’infection sont diminués. Lors de fractures non-réductibles (ex : fractures comminutives), la reconstruction anatomique par fixation interne est souvent impossible et donc, une réduction fermée peut être tentée dans le but de restaurer l’apparence physique du membre versus rétablir l’anatomie normale du membre. La fixation externe ne peut être utilisée pour des fractures proximales au coude et au genou car les articulations de l’épaule et de la hanche ne peuvent être immobilisées. Le principal désavantage de la réduction fermée est la difficulté à obtenir une bonne réduction. Elle n’est donc pas recommandée lors de fracture déplacée. La fluoroscopie (radiographies en vidéo) est un outil pouvant faciliter notre travail et obtenir un résultat maximal. 

Le plâtre est utilisé comme moyen d’immobilisation primaire ou encore, comme fixation supplémentaire suite à une chirurgie orthopédique. Lors de la mise en place, les animaux doivent être sous anesthésie générale car ils doivent rester immobiles tout au long de la procédure. De plus, l’anesthésie va procurer une analgésie supplémentaire pour une meilleure gestion de la douleur. Il est important que le plâtre soit bien moulé à la forme du membre. Les articulations distale et proximale doivent y être incluses. Le lendemain de la procédure, le plâtre doit être réévalué pour s’assurer qu’il est toujours en place et qu’il n’est pas trop serré. Ensuite, le suivi se fait aux semaines. Chez les animaux en croissance, le plâtre doit être changé aux 2 semaines. Chez les adultes, le plâtre peut rester en place de 4 à 6 semaines; il ne peut être laissé en place plus de 6 semaines. Les clients doivent observer les orteils de leur animal à chaque jour pour s’assurer qu’elles ne sont pas enflées, signe que le plâtre est trop serré. Pour faciliter la tâche, ils peuvent être comparés avec ceux de l’autre patte. Les propriétaires doivent aussi s’assurer que l’animal ne lèche pas ou ne déchiquète pas son plâtre. La réhabilitation physique peut être nécessaire suite au retrait du plâtre pour un retour à une fonction normale du membre. La convalescence est généralement plus longue avec un plâtre qu’avec une méthode de fixation interne; Cependant, d’une manière ou d’une autre, l’animal doit être au repos strict jusqu’à l’approbation du vétérinaire traitant pour le retour graduel à l’exercice. 

Le fixateur externe consiste en un appareil métallique conçu à l’aide de tiges pénétrant l’os et étant fixées à l’extérieur du membre. Parmi les indications des fixateurs externes, nous pouvons nommer : fractures des os longs, ostéotomies correctrices, arthrodèses (fusion des os au niveau d’une articulation), immobilisation temporaire des articulations, etc. Cette méthode n’est pas indiquée pour les fractures articulaires. Elle peut être utilisée pour l’immobilisation de fractures comminutives. Un gros avantage est que ces fixateurs sont ajustables, ce qui permet d’améliorer et d’ajuster la réduction de la fracture tout au long de la guérison. 

Les méthodes de réduction ouverte (plaques et vis, tiges intra-médullaires, cerclages, etc) nécessitent une approche chirurgicale. La fracture est alors reconstruite, le but étant de retrouver une anatomie le plus près possible de la normale et ce, à l’aide d’implants. Parmi les indications des méthodes ouvertes, nous pouvons noter les fractures simples déplacées, les fractures longues obliques, les fractures articulaires ainsi que la présence de gros fragments au niveau du site de fracture. Ses avantages consistent principalement en la visualisation directe des fragments osseux lors de la réparation ce qui permet une meilleure réduction contrairement aux méthodes de fixation externe. Cependant, des traumas aux tissus mous ainsi qu’à la vascularisation sont souvent infligés et inévitables lors de chirurgie orthopédique. De plus, le risque d’infection est accru. Cependant, ces méthodes restent, de manière générale, la recommandation numéro 1 pour la gestion de fracture si, bien sûre, la fracture est réductible. 

Les tiges intra-médullaires sont utilisées surtout pour les fractures diaphysaires (humérus, fémur, tibia, ulna,étacarpes, métatarses, etc). Cependant, lors de fracture du radius, la tige ne peut être posée. Cette méthode est recommandée en combinaison avec une autre méthode de fixation telle que les cerclages, le fixateur externe, les vis verrouillées ou plaques/vis afin de limiter les mouvements involontaires de la tige et ainsi, éviter la migration de celle-ci hors de l’os. Pour les fractures impliquant l’articulation, 2 tiges en croix peuvent être utilisées à des fins de stabilisation. 

Les cerclages sont indiqués lors de fracture longue oblique ou spiralée. Ils sont rarement utilisés seuls. Ils sont, en général, plutôt utilisés pour apporter une stabilité supplémentaire. La stabilité de cette méthode dépend principalement de la longueur de la fracture ainsi que de la réduction complète de la fracture. Pour que cette technique soit applicable, il ne doit pas y avoir plus de trois fragments osseux présents, et idéalement, seulement deux. 

Les plaques et vis peuvent être utilisées pour pratiquement n’importe quel type de fracture des os longs, du squelette axial ainsi que des fractures articulaires. Cette technique procure un meilleur confort postopératoire ainsi qu’un retour à la fonction du membre plus rapide. Cependant, les animaux doivent, comme pour toutes autres méthodes de fixation, être gardés au repos jusqu’à guérison complète au risque que les implants lâchent prématurément si tel n’est pas le cas. 

L’amputation, bien que pouvant paraître drastique aux yeux de certaines personnes, peut être une méthode tout à fait acceptable pour traiter une fracture chez un animal de compagnie. Pour les animaux ayant un pauvre pronostic de guérison, cette méthode est la meilleure option pour soulager la douleur de votre animal. De plus, elle ne comporte pas d’effets secondaires contrairement à une médication antidouleur donnée à long terme. Un animal, contrairement à ce que l’on pourrait penser, s’adapte bien à une vie à 3 pattes! Cette méthode étant relativement abordable est aussi une bonne option lorsque des limites budgétaires sont à prendre en considération. 

Le choix d’une technique d’immobilisation appropriée dépend de plusieurs facteurs clés qui doivent être pris en considération :

Facteurs mécaniques (nombre de membres affectés, poids, potentiel de réductibilité de la fracture, etc). Lorsque plusieurs membres sont affectés, le stress mécanique appliqué sur les implants mis en place sera plus important. Chez un patient lourd, un implant est plus à risque de lâcher prématurément que pour un plus petit patient. Certaines fractures peuvent être difficiles voir impossibles à réduire, notamment les fractures avec fragments multiples; la mise en place d’implants internes ne constitue pas la méthode de choix dans ces situations. 


Facteurs biologiques (âge, santé générale, trauma infligé aux tissus mous, localisation de la fracture, etc). Le temps nécessaire à la guérison de l’os varie, entre autre, en fonction des facteurs listés ci-haut et va ainsi influencer le temps minimal pour lequel les implants doivent rester en place et s’avérer efficaces. Par exemple, les patients en santé et âgés de moins de 6 mois vont guérir très rapidement suite à l’immobilisation d’une fracture. À l’opposé, un vieil animal guérira beaucoup plus lentement et nécessitera alors une méthode de fixation plus importante et plus stable qu’un simple plâtre. Lorsqu’une fracture est ouverte, les tissus mous adjacents à l’os sont endommagés. Ces tissus aident habituellement à supporter et à vasculariser l’os, ce qui offre respectivement une meilleure immobilisation et accélère la guérison. Souvent, les fractures ouvertes sont moins enclines à être traitées via fixation interne car les tissus mous ne peuvent jouer leur rôle. La localisation de la fracture va aussi influencer la méthode de fixation; la diaphyse (portion longue des os) guérit plus lentement que la métaphyse ou l’épiphyse (extrémités des os). 

Facteurs cliniques (capacité des clients à apporter les soins postopératoires nécessaires, patient coopératif, budget, etc). Les méthodes d’immobilisation externe telles que les plâtres et les fixateurs externes demandent de longs soins que certains propriétaires n’ont pas le temps ou la patience d’effectuer. Dans ces cas, une méthode de fixation interne est une meilleure option à envisager. Les patients surexcités qui seront impossibles à mettre au repos ne sont pas de bons candidats pour l’immobilisation externe car un plâtre ne tiendra pas en place bien longtemps! Cependant, même avec l’utilisation d’implants, ces derniers peuvent lâcher prématurément si le patient n’est pas coopératif durant sa convalescence. Le budget est aussi à prendre en considération; il va s’en dire qu’une intervention chirurgicale peut amener des coûts beaucoup plus importants qu’un simple plâtre.