Persistance du ductus arteriosus (PDA)

C'est quoi?

Votre chiot femelle de race caniche miniature âgée de 8 semaines vient de se faire vacciner par son vétérinaire. À l’auscultation cardiaque, celui-ci a noté la présence d’un souffle qu’il soupçonne d’être causé par la persistance du canal artériel (ductus arteriosus). Mais en quoi consiste un souffle cardiaque et qu’est-ce que le canal artériel? Il est important de d’abord bien comprendre comment le sang circule dans le système cardiovasculaire. 

Après avoir passé dans les différents organes du corps, le sang, maintenant mal oxygéné (bleuté), est transporté par les veines jusqu’au côté droit du cœur qui le propulse, via les artères pulmonaires, jusqu’aux poumons où il sera oxygéné (circulation pulmonaire ou petite circulation). Par la suite, ce sang frais (rouge) est acheminé par les veines pulmonaires jusqu’à la partie gauche du cœur qui l’éjecte, à son tour, dans l’aorte. Cette dernière se divise en plus petites artères qui transportent le sang jusqu’aux organes (circulation systémique ou grande circulation). La trajectoire du sang dans tous ces tuyaux se fait de façon plutôt linéaire et à sens unique.


Traitement

Le traitement de la condition consiste à procéder à la fermeture du canal artériel sauf lorsqu’on a affaire à un shunt droite-à-gauche, un shunt bidirectionnel ou encore lorsqu’il y a présence simultanée de certaines autres malformations cardiaques. Différentes techniques peuvent être utilisées pour atteindre cet objectif. Le canal peut être ligaturé chirurgicalement en ouvrant la cage thoracique ou on peut avoir recours à des moyens peu invasifs qui incluent des techniques intravasculaires ainsi que la chirurgie thoracoscopique.
 
Avec les techniques intravasculaires, on passe par l’artère de la cuisse ou de l’avant-bras pour aller insérer différents types de matériaux à l’intérieur du canal artériel qui causeront son occlusion tandis qu’avec la chirurgie thoracoscopique, on utilise une caméra rigide que l’on fait entrer dans le thorax afin de visualiser la pose de clips de titanium sur le canal artériel. 

La décision de choisir une option thérapeutique plutôt qu’une autre dépend de plusieurs facteurs. Lorsque le traitement le plus approprié est institué tôt, le pronostic à long terme peut être excellent. 

Dre Isabelle Lacombe M.V. 

RÉFÉRENCE : 
Broaddus, K.D. et Tillson, M. Patent Ductus Arteriosus in Dogs. Compendium on Continuing Education for Veterinarians. Septembre 2010. 

Un souffle représente la turbulence du sang et est entendu comme un écho qui accompagne le bruit saccadé des battements cardiaques engendré par la fermeture des valves séparant les chambres cardiaques. Le canal artériel agit, pendant la vie fœtale, comme un tunnel reliant l’aorte à l’artère pulmonaire. Sa présence permet au sang sortant du cœur droit par l’artère pulmonaire d’être déversé directement dans l’aorte parce que la résistance des vaisseaux pulmonaires est plus grande que celle des vaisseaux de la circulation systémique. Les poumons qui sont collapsés et non-fonctionnels se font donc court-circuiter et c’est le placenta qui oxygénise le sang fœtal. 

À la naissance, les poumons prennent de l’expansion, ce qui entraîne une dilatation des artérioles pulmonaires et par conséquent, une réduction importante de la résistance des vaisseaux pulmonaires en-deçà de la résistance des vaisseaux de la grande circulation. En même temps, des changements biochimiques entraînent la fermeture du canal artériel qui devient alors une structure élastique non-patente que l’on appelle le ligament artériel. La circulation sanguine s’effectuera donc dorénavant de la façon décrite plus haut. 

Lorsque le canal artériel ne se ferme pas, du sang passe continuellement de l’aorte à l’artère pulmonaire (shunt gauche-à-droite) et ce, tant que la pression de la grande circulation reste plus élevée que la pression de la circulation pulmonaire. Il s’ensuit une augmentation de la quantité de sang passant par les poumons et qui arrive au niveau de la partie gauche du cœur. Avec le temps, à cause de cette surcharge de liquide, la musculature du cœur gauche va s’épaissir et se dilater au point où celui-ci deviendra inefficace à pomper le sang dans tout l’organisme. On parle alors de défaillance cardiaque gauche. Le côté droit du cœur peut finir par être affecté aussi parce qu’il continue d’envoyer du sang au cœur gauche, mais comme celui-ci ne se contracte pas adéquatement, le sang va refouler en arrière ce qui entraînera une augmentation de la quantité de liquide dans le cœur droit avec épaississement et dilatation de la musculature. La défaillance cardiaque deviendra alors généralisée. Ceci peut se produire aussi tôt qu’à une semaine d’âge mais peut aussi survenir plusieurs années plus tard. Cependant, 70% des chiens ayant un PDA auront des symptômes de défaillance cardiaque avant l’âge d’un an. Le diamètre du PDA semble déterminer l’âge auquel les symptômes feront leur apparition. 

La persistance du canal artériel est la maladie cardiaque congénitale (présente à la naissance) la plus fréquente chez les chiens. C’est une condition qui est héréditaire chez plusieurs races : les caniches miniatures et toy, les poméraniens, les shetlands, les épagneuls springer anglais et cockers, les keeshonds, les bichons frisés, les yorkshires terriers et les collies. Les femelles de races toy sont surreprésentées. Lorsque détecté à un jeune âge, il est possible que le chiot n’ait aucun symptôme ou il peut démontrer une légère intolérance à l’exercice ainsi qu’un retard de croissance. Parfois les propriétaires rapportent qu’ils sentent le cœur de leur chiot vibrer. Souvent, c’est pendant l’examen physique effectué entre 6 à 12 semaines lors de la vaccination de routine que le PDA est identifié.
 
En effet, à l’auscultation cardiaque du côté gauche, on peut souvent entendre un souffle classique que l’on dit de ``machinerie``. Afin de préciser le diagnostique, on aura recours à la radiographie thoracique pour évaluer les changements anatomiques au niveau du cœur, à l’électrocardiographie pour évaluer la dilatation des chambres cardiaques ainsi qu’à l’échocardiographie (échographie cardiaque) pour déterminer si d’autres malformations cardiaques sont présentes et s’il y a des changements dans l’épaisseur de la paroi cardiaque ainsi que dans la grosseur des chambres cardiaques. 

Une petite proportion de chiens affectés d’un PDA sont présentés parce qu’ils souffrent d’une intolérance sévère à l’exercice accompagnée ou non d’un collapse des pattes arrières pendant l’exercice. Ceci survient lorsque le sang circulant dans le canal artériel change de direction (shunt droite-à-gauche). Au lieu d’avoir uniquement du sang oxygéné transporté dans l’organisme, le sang non-oxygéné provenant de l’artère pulmonaire se mélange avec le sang oxygéné dans l’aorte. Étant donné que les artères nourrissant la partie antérieure du corps se détachent de l’aorte avant le PDA, c’est la partie postérieure du corps qui reçoit le sang mal oxygéné. Par conséquent, il est typique d’observer une teinte bleutée au niveau de celle-ci bien que la partie antérieure puisse aussi présenter une telle cyanose. 

Certains chiens naissent avec un shunt droite-à-gauche alors que d’autres le développent sur une période de plusieurs semaines à plusieurs mois. Normalement, après la naissance, la résistance vasculaire pulmonaire équivaut à 20% de la résistance vasculaire systémique. Chez les chiens souffrant d’un shunt droite-à-gauche congénital, l’on pense que leur résistance vasculaire pulmonaire ne diminue pas à la naissance, ce qui entraîne de l’hypertension pulmonaire pouvant devenir dangereuse pour la survie du chien. Chez les chiots qui naissent avec un très gros PDA, il n’y a habituellement aucune résistance au mouvement de sang. La pression persistante appliquée sur les artères pulmonaires leur cause des dommages qui, combinés à l’augmentation des facteurs de croissance, mène à la prolifération des cellules de la paroi des artères. Ceci entraîne un rétrécissement de leur diamètre et par conséquent, une augmentation de leur résistance. Ainsi, entre l’âge de 3 mois et 3 ans, la résistance vasculaire pulmonaire en vient à dépasser la résistance vasculaire systémique et il y a alors renversement de la direction du flot sanguin dans le canal artériel créant ainsi un shunt droite-à-gauche.